Dax : Interview de Patricia Yvora, Directrice du service développement économique et commercial et Manager de ville

Dax, cité thermale de 21 000 habitants, accueille chaque année près de 60 000 curistes au cours de la période de mars à novembre, se positionnant ainsi comme le 1er pôle thermal de France. Idéalement située entre Bordeaux et le pays basque, Dax compte aussi tirer profit de la métropolisation et bénéficier notamment du développement de la LGV. Ville marquée par l’Histoire, elle dévoile aux habitants et touristes ses charmes antiques avec son patrimoine gallo-romain, et ses remparts toujours visibles, ainsi que sa grandeur Art-déco, période faste, l’ayant dotée d’une identité particulière. Associé aux traditions, au rugby, à l’accent du sud, et autres produits régionaux, ceci en fait une parfaite candidate pour le dossier « label Ville et Pays d’art et d’Histoire » actuellement en cours… Partons en balade avec Patricia Yvora, Directrice du service développement économique et commercial et Manager de ville, qui œuvre au quotidien pour le dynamisme du cœur de ville.

Morgane Grillot : Quelles sont les caractéristiques du centre-ville de Dax?

Patricia Yvora : Le cœur de ville est vraiment marqué par l’Histoire (remparts, arènes), et par les traditions. Il offre un plateau commercial piétonnier, lui-même encerclé par un cours urbain pourvu de parkings facilitant le stationnement. La Ville de Dax compte 600 cellules commerciales, dont 400 situées en hyper-centre. On y constate une suprématie du commerce indépendant, présent à hauteur de 75{f59ab8d0ed1dd4d6a051c01e581606e7e9512527126d034342cc38ee5a6c8dd4}, le reste s’équilibrant autour d’enseignes nationales et de franchises. Nous nous donnons les moyens d’aller à la rencontre de ces grandes enseignes, tout l’objectif de mon service est de réussir à les convaincre de se déplacer sur le territoire. Au dernier Salon Franchise Expo, nous sommes venus avec une plaquette numérique, qui s’est clairement affichée comme un outil de communication très efficace. Mon discours en tant que personne de terrain, celui de mon élue, appuyés par les visuels de la plaquette a su convaincre certaines enseignes, avec lesquelles nous avons décroché des entretiens et qui sont venues directement sur Dax pour se rendre compte de son potentiel économique. Nous enregistrons plusieurs associations de commerçants (Daxatou, Halles, Cafetiers, Rive droite). C’est Daxatou la plus représentative avec 204 adhérents qui les fédère et qui est donc notre interlocuteur. Nous travaillons main dans la main pour l’animation du cœur de ville. Un véritable travail en synergie a été instauré maintenant depuis 2009, il s’est amélioré au fil des années, et porte aujourd’hui ses fruits, en proposant des animations une fois par mois rythmant le centre-ville, et le rendant véritablement attractif.

« depuis 2009, un véritable travail en synergie avec les différents acteurs du commerce a été établi, ce qui permet de proposer des animations une fois par mois rythmant le centre-ville, et le rendant véritablement attractif »

Morgane Grillot : Justement quelle est votre politique en terme d’animation commerciale?

P.Y : Chaque mois est donc rythmé par une « opé ». J’insiste sur un véritable travail en synergie, qui englobe donc Daxatou, la Ville mais également l’Office de Tourisme et de grandes enseignes nationales comme Les Galeries Lafayette. Cela permet d’avoir une offre cohérente en termes d’animations, qu’aucune ne soit cannibalisée par une autre mais plutôt que l’ensemble des commerçants tirent profit de l’affluence des chalands. Exemple concret, du 5 au 15 Octobre prochain, aura lieu les « 10 Jours Shopping » organisés par Daxatou, en synergie avec les 3J des Galeries Lafayette, et également ponctué par la 6ème édition du Salon des vins VINOFERIA. L’ensemble de ces événements permettent de créer une véritable visibilité commerciale, les opérations ne sont pas concurrentielles mais ont lieu pour un objectif commun : multiplier les envies des consommateurs de venir en ville. La Ville soutient ces événements, et le service développement économique & commercial/Management du centre ville centralise et met à jour les manifestations. Exemple de coordination très aboutie : les fêtes de Noël un programme concocté par l’Office de tourisme en étroite collaboration avec Daxatou,avec le concours de l’ingénierie de la ville pour la communication et la logistique. Au final : un seul programme qui regroupe tous les événements festifs et commerciaux. Nous pouvons également citer la « Nuit des Soldes », organisée par Daxatou qui se tient le 1er vendredi suivant le début des Soldes d’été. Cette grande soirée shopping propose une nocturne jusqu’ à 23h, la gratuité des horodateurs dès 18h, et de nombreuses animations familiales et musicales (structures gonflables, sévillanes…), en partenariat avec les cafetiers de la ville. Cette année, pour la première fois, les commerçants de Daxatou ont organisé une opération spéciale Rentrée. Fort du constat que les supermarchés avaient tendance à s’approprier cet événement et à fortement communiquer dessus dès la mi-août, les commerçants du centre-ville ont décidé eux-aussi de « fêter la rentrée ». Cet événement a permis de capitaliser sur l’attractivité du centre-ville, et de conforter les fichiers clients. L’opération « Artistes en ville » est également un beau succès. Du mois d’avril au mois de septembre, des artistes installent leurs chevalets en cœur de ville et mettent en place des expositions autour des sites marchands les derniers jeudis de chaque mois. Ce sont les cafetiers eux-mêmes qui ont souhaité que le rendez-vous soit dupliqué également le 1er jeudi du mois tout au long de l’été. Je peux également vous citer le marché des producteurs de pays, privilégiant les circuits-courts qui a accueilli sur une centaine de grandes tablées conviviales près de 1200 personnes et vendu 1600 assiettes au mois d’août. Des concerts de « Garçon la Note », ce festival à succès de l’Office de tourisme, à la réappropriation du fleuve Adour avec « Les Berges éphémères » organisées par la ville où transats, parasols et animations prennent rang durant l’été, l’objectif est toujours le même « créer du flux » et permettre aux habitants de s’approprier leur cœur.

« l’objectif est toujours le même « créer du flux » et permettre aux habitants de s’approprier leur cœur. »

Morgane Grillot : Et du côté des outils techniques, quels sont ceux développés ou en ce cours de développement en faveur de l’attractivité du centre-ville ?

Patricia Yvora : La ville a instauré la TFC (taxe sur les friches commerciales) appliquée aux propriétaires de locaux vacants depuis plus de 2 ans. Cette taxation intervient dans un dispositif plus global piloté par le Service développement économique & commercial /Management de centre-ville. Cette taxation n’est pas une finalité en soi, elle permet avant tout de sensibiliser les propriétaires en les alertant sur le fait que les locaux inoccupés nuisent à l’attractivité commerciale du centre-ville et qu’ils peuvent être accompagnés. Ils sont prévenus tout d’abord par un courrier, certes parfois un peu musclé… surtout ceux adressés aux propriétaires « profiteurs » qui délaissent leurs devantures et qui pratiquent des loyers exorbitants sans volonté de louer. Cet outil a l’avantage de faire bouger les lignes : beaucoup de devantures ont été améliorées, et en 2 ans, 10 locaux ont trouvé preneur. Autre outil important, l’évolution du PLUi (document de planification à l’échelle intercommunale) pouvant être modifié afin d’intégrer la protection du linéaire commercial et empêcher les mutations du centre-ville, en guidant ainsi l’aménagement et le développement du territoire. C’est un dispositif qui permet d’agir sur la géographie des commerces. A l’inverse du droit de préemption, cette réglementation intervient en amont en permettant à la Ville de délimiter un périmètre de sauvegarde dans lequel elle peut s’opposer à certains types de services qu’elles jugent inappropriés à l’attractivité de l’hyper-centre (multiplication des agences bancaires ou mutuelles par exemple sur certains axes…). Nous avons mis en place également une aide au ravalement de façades : en 6 ans, 113 rénovations ont été effectuées avec des subventions de fonds publics. L’opération urbaine collective avec des fonds FISAC (Ville, Région et Etat) a permis d’aider 13 commerçants et artisans pour moderniser leurs boutiques en 2 ans.

« cette réglementation intervient en amont en permettant à la Ville de délimiter un périmètre de sauvegarde dans lequel elle peut s’opposer à certains types de services qu’elles jugent inappropriés à l’attractivité de l’hyper-centre. »

Morgane Grillot : Quels sont les enjeux actuels pour le centre-ville en termes d’aménagements urbains notamment ?

P.Y : De nombreux projets en gestation vont éclore sur les prochaines années, impulsant une véritable dynamique de territoire. Il s’agit d’investissements publics mais également privés pour des équipements structurants de diverse nature. Dans le cadre du programme « Coeur de Ville », la municipalité a décidé de réhabiliter les Halles avec pour objectif de positionner celles-ci comme pôle structurant de l’équipement commercial de l’Agglomération pour la valorisation des produits du terroir et des circuits courts, au cœur des marchés de plein air. Aujourd’hui après un diagnostic commercial et fonctionnel, l’objectif est de redonner son statut de pôle alimentaire aux Halles. Le projetconcerne aussi son environnement urbain afin de l’insérer, lui redonner une identité (de l’extérieur certains Dacquois peinent à savoir que ce sont des Halles de marché !), et aménager ses abords en réaménagement le parking semi-aérien voisin en esplanade multifonctions, événementielle et commerciale. Les travaux intégreront évidemment la
mise aux normes de tout l’ensemble : parking souterrain, RDC commercial et 1er étage tertiaire. Sans oublier, la connexion très haut débit pour permettre à la clientèle d’accéder à de nouveaux services : drive, commande en ligne… En attendant ces travaux opérationnels, nous avons souhaité revoir son positionnement en appliquant des préconisations aux commerçants : travailler sur les horaires, donner une meilleure visibilité aux étals, donner une identité reconnaissable et valorisante. Nous avons créé la marque « Place aux Halles », et lancé notamment la campagne de communication de portraits géants des commerçants accrochés à l’extérieur des Halles. Nous avons également accompagné le temps fort commercial « le brunch dominical » organisé depuis le mois de mai 2016 pour renforcer leur attractivité et proposer un moment convivial. Beau succès qui permet de capitaliser et fidéliser la clientèle !

Cet élan donné par la ville a aussi pour objectif d’aider l’association des commerçants des Halles à impulser une dynamique commerciale. Cet accompagnement a déjà des effets, notamment la création de page Facebook pour la plupart des commerçants. Et une première opération gastronomique concoctée par l’association des Halles fin octobre : la Fête du « guit » (à savoir la fête du canard) à l’occasion de la relance des produits issus du canard : foie gras, magret au sortir de la crise aviaire. C’est une belle initiative qui s’inscrit dans la lignée de « Toqués de canard » organisée à Paris avec le concours de grands chefs landais. Nous incitons aussi L’association des Halles, qui compte des membres du collège culinaire de France à participer au programme d’animation des festivités de Noël. De plus, depuis le mois de Juin, nous avons déplacé notre marché historique « Textile et bazar » sur la place de la Fontaine Chaude afin de le positionner au plus près des commerces et des cafés-restaurants du cœur de ville et de le redynamiser. Ce déménagement permet également de libérer 200 places de stationnement aux portes des rues de piétonnes, ce qu’apprécient les commerçants riverains. Ces changements interviennent après une concertation de l’ensemble des acteurs. Ce transfert de marché est une très grande réussite, essai transformé !  La réhabilitation de 2 équipements phares du centre-ville est également un enjeu important sur les 2 années à venir. La refonte du modèle économique de l’Hôtel Splendid afin que cet établissement emblématique de la Ville soit un fleuron du développement économique et touristique avec des équipements spa, cuisine gastronomique, hôtellerie ****. Par ailleurs, l’établissement construit par Jean Nouvel, racheté par un opérateur thermal de renom, est en cours de réhabilitation afin d’apporter une offre complémentaire au thermalisme médical. Ces 2 projets vont de pair avec celui de golf privé. A venir également, la reconversion d’un bâtiment de caractère en médiathèque et le lancement du pôle aquatique porté par l’Agglomération et qui sera situé au cœur du territoire de Dax. Ces projets très structurants, dont la gestation peut sembler longue en raison des multiples procédures administratives et levée de fonds nécessaires, vont se concrétiser et permettre d’enclencher une montée en gamme souhaitée pour accueillir et développer le tourisme d’affaires.

M.G : un grand merci Patricia !